Je ne cautionne pas ces propos stupides et qui occultent volontairement la situation au sein du groupe SNCF d'un décrochage des salaires sur plus d'une décennie (dépasser une inflation sur une année bien choisie, qui a bien baissé, alors que le salaire réel a pris -15% en dix ans, pas de quoi sabrer le champagne) et de difficultés croissantes de recrutement. Plusieurs journaux ont de telles tribunes à chaque mobilisation des cheminots.
CHRONIQUE. Plusieurs organisations menacent d'une grève durant le week-end du 8 mai. Avec des arguments qui confinent au surréalisme.
D'un long week-end à l'autre. Lundi 21 avril, alors que beaucoup de Français s'apprêtaient à prendre le train pour rentrer à leur domicile et que la mort du pape François occupait de nombreux esprits, le secrétaire fédéral du syndicat SUD-Rail, Fabien Villedieu, était occupé à tout autre chose. Il défendait l'indéfendable, avec des arguments que l'on peut, si l'on est décidé à garder son calme, qualifier de discutables. Par exemple : « nous avons fait l'effort » de ne pas faire grève pendant les vacances scolaires, alors « il va falloir nous dire quand on a le droit de faire grève ».
Cette fanfaronnade intervient après les propos tenus, ce week-end, par le ministre des Transports Philippe Tabarot, qui a appelé les syndicats « à la responsabilité pour éviter un conflit que les Français ne supportent plus ». Il réagissait aux multiples préavis de grèves déposés autour du pont du 8 mai , notamment de la part des contrôleurs. Il estime que leurs revendications ne sont « pas légitimes », car ceux-ci « ne sont pas les plus maltraités au sein de la SNCF ».
Pas les plus maltraités, mais les plus incontournables, puisqu'aucun TGV ni aucun TER ne peut démarrer sans la présence d'un contrôleur à son bord. Tout préavis de grève issu de leurs rangs provoque donc des sueurs froides, au ministère des Transports comme parmi les Français.
D'autant que le dialogue social, dont Fabien Villedieu se dit un « croyant », est devenu plus difficile avec l'émergence des « grèves Facebook » apparues en décembre 2022. Les contrôleurs se sont alors regroupés au sein d'un collectif baptisé CNA (pour « Collectif national des agents du service commercial trains »). Depuis, les syndicats leur courent après, de peur de se faire distancer dans les instances de représentation.
Une « prime de travail » multipliée par quatre
SUD-Rail, deuxième syndicat chez les contrôleurs, a le ministre des Transports dans le collimateur. Celui-ci, quand il siégeait encore au Sénat, en décembre dernier, avait déposé et fait voter une proposition de loi destinée à empêcher les grèves à l'approche des périodes de grands départs. Ce texte, qui n'a, pour l'heure, pas été présenté à l'Assemblée nationale, prévoit de suspendre le droit de grève dans le secteur des transports lors des vacances scolaires de la Toussaint, de Noël, d'hiver, de printemps et d'été, ainsi que durant les week-ends prolongés.
SUD-Rail, par la voix de son secrétaire fédéral, considère que le ministre « met de l'huile sur le feu ». Mais de quel feu s'agit-il ? Les négociations salariales à la SNCF ont apporté des revalorisations salariales supérieures à l'inflation. Insuffisant pour convaincre les syndicats concernant les contrôleurs, qui ne veulent plus de changements de plannings et se battent pour leur « prime de travail ». « Prime de travail » ? Il s'agit d'un étrange concept, où l'on est récompensé, en sus de son salaire, pour avoir simplement accompli sa tâche. Or, cette prime est passée de 106 à plus de 400 euros en l'espace de quelques années.
Mais ce n'est pas assez, parce que la SNCF a commis un grave péché aux yeux de monsieur Villedieu et de ses camarades. L'entreprise publique a annoncé des bénéfices, il y a quelques semaines. Dès lors, le disque rayé des syndicats s'est remis à tourner...